Prologue
Gotham city. 20:07
- HAHAHAHAHA !
Son rire résonna dans la petite pièce sombre tandis qu'il affichait un grand sourire. Il détailla le couple qui se tenait devant lui et se délecta de la peur qu'il leur inspirait. Cette sensation était la meilleure qu'il puisse ressentir. Il inspira longuement et expira. Puis, il se remit au travail.
- Où est-elle ? cria-t-il.
- Je... je n'en sais rien, bredouilla l'homme.
- Tu n'en sais rien ?! On va voir cela.
- Ne... ne nous faites p.… pas de mal, supplia l'homme, le visage déformé par la terreur.
Sans faire attention aux paroles de l'homme, il sortit un long couteau effilé et le brandit d'un air menaçant. Il faisait jouer la lumière sur le métal, renvoyant des rayons aveuglants dans les yeux de ses victimes.
- Je ne vous le dirais pas cent fois. Où est ma fille ?
- Je... je vous dis qu... que nous ne le savons pas.
- Vraiment ?
Il s'avança d'un pas vers la femme, affichant un immense sourire diabolique et posa le couteau sur sa peau. Le sang coula lentement tandis que l'euphorie s'emparait de lui.
- Attendez ! Je... je connais son nom.
- Oui ?
- C'est... c'est Isabelle Cliff.
- Parfait ! Ce n'était pas si difficile ?!
Sur ces paroles, il sortit son revolver et tua le couple d'une balle dans la tête avant de partir, son rire retentissant autour de lui.
Chap. 1
Le lendemain. 8:00
- Je n'arrive pas à y croire ! m'exclamai-je, assise à une table devant le lycée.
Le journal posé devant moi, je regardais la une : LE JOKER A ASSASSINÉ UN COUPLE DE PÉDIATRE. Une photo de lui était positionnée en dessous. Il affichait un sourire rouge sang qui contrastait avec sa peau blême et ses cheveux verts. Ses yeux, pétillants de cruauté, étaient d'un bleu impur. Des tatouages étaient disséminés par ci par là, parfois cachés par un long manteau violet.
- Ça ne m'étonne pas de lui, me répondit Clémence lorsqu'elle lut à son tour le titre.
- Oui mais..., fis-je, interrompue par la sonnerie.
Je pliai le journal et suivit Clémence, ses longs cheveux blonds flottant dans le vent, le long des couloirs jusqu'à notre classe de chimie. Soudain prise d'une sensation étrange, je m'arrêtai, la main appuyée sur le rebord de la porte, et repris mon souffle. Ma vision se troubla momentanément, m'emportant dans les ténèbres. Une image incongrue s'imprima sur ma rétine. Puis, je sentis des bras musclés me soutenir et je revins peu à peu dans la réalité.
- Tout va bien ? lança une voix derrière moi.
Je me retournai et vis Rémy, un jeune homme aux cheveux bruns et aux yeux vert amande, qui me portait légèrement. Il me sourit quand je croisai son regard et il me redressa comme si c'était la chose la plus naturelle du monde que de sauver les demoiselles en détresse.
- Ça va, lui répondis-je, un peu trop vivement.
- On ne dirait pas, tu es encore plus pâle que d'habitude.
Je partis m'asseoir sans lui accorder la moindre attention, préoccupée par la vision que j'avais eu quelques secondes plus tôt. J'avais entraperçu deux personnes, comme dans un souvenir lointain. Deux personnes qui ne m'inspiraient aucune confiance et qui symbolisaient, à mes yeux, la folie et la crainte : le Joker et sa partenaire, Harley Quinn. Je fus interrompue dans mes pensées par l'arrivée du professeur et le silence s'installa peu à peu dans la pièce.
- Monsieur, j'aurais une question avant de commencer le cours, fit subitement Rémy.
- Oui, vas-y Rémy, je t'écoute, répondit-il.
- Comment le Joker peut avoir un teint aussi blanc ?
- Comme vous le savez sûrement, ce n'est pas naturel. Le Joker, connu pour sa folie légendaire, a combattu son ennemi Batman et a perdu. La police l'a retrouvé dans de l'acide avec un tout nouveau visage : les cheveux verts, les lèvres rouges et la peau d'une blancheur sans précédent. Puis, nous ne savons pas trop comment, il s'est échappé et depuis, les forces spéciales le recherchent activement.
- Donc Harley Quinn a aussi été plongée dans de l'acide ? demanda une personne au fond de la classe.
- C'est exact, mais c'est l'œuvre du Joker, cette fois-ci, répondit le professeur. Il voulait qu'elle devienne comme elle.
- Et bah c'est réussi, elle est aussi folle que lui, fit un jeune homme.
- C'est parce qu'elle a reçu un lavage de cerveau, lança quelqu'un d'autre.
- Oui, avant elle n'était pas comme ça, elle était psychologue. Jusqu'au jour où elle est tombée amoureuse du Joker, rétorqua une voix.
Un débat s'installa dans la pièce, suivant des théories toutes plus farfelues les unes que les autres au sujet de l'origine des deux bandits. Des paroles fusaient çà et là, emplissant la pièce de tonalités différentes suivant les personnes qui les prononçaient.
- S'il vous plaît, calmez-vous ! soupira le professeur au bout d'un moment, mais personne ne lui prêta attention.
Tandis que le vacarme retentissait alentour, j'ouvris le journal et détaillai la photo de la Une. Des détails m'apparurent, des détails que je n'avais pas remarqués avant. Des mèches noires perçaient dans ses cheveux verts. Des cicatrices encadraient son corps et ses muscles saillants. Des cernes noirs apparaissaient sous ses yeux, les rendant ténébreux et mystérieux, tout comme son propriétaire : Mr J.
Lisant l'article aussi discrètement que possible, je ne parvins pas à déterminer la motivation de celui-ci. Il n'y avait aucune logique dans ses actes. "Les gens ne naissent pas mauvais, ils le deviennent. Le tout est de savoir ce qui les a poussés à évoluer comme ça." songeai-je.
Sans que je m'en rende compte, la sonnerie retentit, me faisant sursauter. Après avoir rangé mes affaires, je sortis de la salle lorsqu'une main me retint le poignet. Je me retournai, surprise, et découvris Rémy qui détaillai avec soin le journal sous mon bras.
- Je t'ai vu le lire en douce pendant le petit débat, fit-il en le montrant du doigt. Qu'est-ce que tu sais sur lui ?
- Tu m'espionnes maintenant ? répondis-je, perplexe. Sinon non, rien de ce que l'on sait déjà.
- Mais tu as appris quelque chose, non ? Je le vois dans ton regard, objecta-t-il, un peu désespéré.
- Primo, il n'y a rien dans mon regard. Secundo, oui, j'ai aperçu quelques détails et...
- Lesquels ? demanda Rémy subitement.
- Tu n'as jamais remarqué des mèches noires derrière celles vertes ?
- Noirs comme tes cheveux ?
- Parce qu'il y a différents noirs ?! dis-je, irritée.
- Laisse tomber. Non je n'avais pas remarqué. Autre chose ?
- Il a des cicatrices aussi, expliquai-je.
- C'est normal pour un psychopathe ! s'écria le jeune homme.
- Si tu ne veux pas m'écouter, c'est ton problème. Mais tes commentaires puérils, j'en veux pas, fis-je en m'en allant.
- Attends ! S'il te plaît, Isabelle !
Je fis comme si je ne l'avais pas entendu et partis sans demander mon reste. Tandis que je m'éloignai, une voix s'insinua dans ma tête, résonnant encore et encore comme un appel. Deux mots étaient répétés en continue. Deux mots que je connaissais parfaitement. Mon nom : Isabelle Cliff.
Chap. 2
Même journée. Fin des cours. 18:00
- Je deviens folle ! J'entends des voix maintenant ! fis-je en m'adressant à Clémence.
- Mais non, ça arrive à tout le monde, ne t'inquiète pas, me rassura celle-ci. Un jour, j'ai même entendu Superman me dire que j'allais réussir mon examen de maths, et je l'ai fait alors que je déteste ça.
- Arrête de te moquer de moi, ça n'a rien de drôle !
- Alors arrête d'être parano pour un rien, répliqua-t-elle.
Puis, elle alla rejoindre son copain, Jordan, un châtain aux yeux noisette, et s'installa à sa table, à l'ombre d'un chêne. Je les rejoignis en ressassant les paroles de cette drôle de voix ainsi que les mots de Clémence. Elle avait raison, après tout, je devais être un peu parano.
- Je te ramène, voisine ? me lança Jordan, coupant court à mes pensées.
- Non merci, je vais marcher un peu, lui répondis-je en souriant.
- Ok, à demain alors !
- Je t'appelle ce soir, me chuchota Clémence avant de suivre le jeune homme jusqu'à sa voiture.
- Pas de soucis, fis-je en ramassant mon sac.
Puis, je partis à mon tour, faisant mon parcours quotidien. Tandis que je marchais tranquillement devant le lycée, les écouteurs dans mes oreilles, je fis le vide autour de moi et me laissais bercer par la musique qui résonnait dans ma tête. Je fus troublée dans mon confort par Jason, le jumeau de Jordan, qui était accompagné par son meilleur ami, Rémy.
- Hey, Isabelle ! T'aurais pas vu mon frère, par hasard ?
- Il est parti avec Clémence, lui répondis-je en arrêtant ma chanson préférée.
- Et il a pris la voiture ?
Je hochai la tête, préférant le geste à la parole.
- Je vais lui faire la peau ! s'écria-t-il. Bon Rémy, je crois que tu vas devoir me ramener.
- En effet, acquiesça l'intéressé.
- Eh bien merci Isabelle. A plus !
- Au revoir les garçons ! fis-je en reprenant mon chemin.
Observant les deux jeunes hommes poursuivre leur route de leur côté, je remarquai une chose. Les jumeaux Fried, que je connaissais depuis ma plus tendre enfance, se ressemblaient beaucoup physiquement mais leur comportement était à l'opposé l'un de l'autre. Jordan était un passionné d'histoire qui se sentait concerner par son avenir tandis que Jason adorait se moquer de son frère et le sport, notamment le basket, le seul point commun entre eux deux. Jason était capitaine de l'équipe du lycée et sortait avec Lily, une pom-pom girl, depuis plus d'un an. Elle n'était pas une de ces filles superficielles et avait les pieds sur terre. C'était quelqu'un de très gentille toutefois, je ne la connaissais pas très bien, ayant un an de moins que nous.
Quant à Rémy, il faisait partie de l'équipe de basket en tant que co-capitaine. Il avait des facultés en cours et arrivait toujours à obtenir des bonnes notes. Avec Jason, ils étaient les sportifs que tout le monde adorait. Malheureusement, il nageait aussi avec le lycée, tout comme moi. Ce n'était pas que je ne l'aimais pas mais à chaque fois que je le voyais, il trouvait un moyen pour me mettre en colère. Toutefois, il nous arrivait d'avoir des bons moments aussi. Des souvenirs de courses poursuites dans les couloirs du lycée, de bataille d'eau et de mousse à raser et de défis me revinrent en mémoire. Il y en avait cependant un en particulier que je chérissais beaucoup.
C'était un soir, à la natation, pendant qu'un match de water-polo éclatait, Rémy s'amusait à me couler et à m'éclabousser tout en gardant les cages de son équipe. J'étais restée près de lui afin de pouvoir marquer contre lui et gagner le match. C'est alors qu'un de nos camarades nous avait demandé si nous étions frères et sœurs. Nous avions éclaté si forts de rires que nous coulions à moitié. Toutefois, c'était la première fois que nous rions ensemble. Son rire avait été une mélodie à mes oreilles. Une mélodie que je n'ai jamais cessé d'oublier.
Sans m’en apercevoir, je me trompai de rue et constatai avec surprise que celle-ci débouchait sur une impasse. Me retournant, je vis des silhouettes à l’entrée du passage. Je continuai sans prêter attention à celles-ci. Toutefois, je ne savais pas que je commettais la plus grande erreur de ma vie. En effet, elles me barraient la route et se rapprochaient dangereusement de moi. La panique s’empara de mon corps et mon cœur se mit à battre frénétiquement. Elles étaient drapées de vêtements sombres et de cagoules, si bien que je ne pus examiner leur visage. L’une d’elles sortit un couteau de sa poche et un cri de stupeur s’échappa de ma gorge. Puis, je me mis à courir, allant le plus vite possible. Grâce à mon jogging quotidien, je parvins à les semer de quelques secondes seulement. Jusqu’à ce que je percute un grand homme au visage pâle.
- Où vas-tu ma petite ? me demanda-t-il dans un vaste sourire.
Puis, des grosses mains m’attrapèrent les bras et m’emprisonnèrent. Je me débattis aussi brutalement que je le pouvais. Je ne réussis qu’à repousser un de mes assaillants, lui décochant un coup dans le nez. Du sang perla de sa blessure et il se nettoya avec la manche de sa veste. L’homme pâle s’avança prudemment et d’un geste nonchalant, approcha de mon visage un gant humide qui empestait l’alcool. Ma vue commença à défaillir et mes membres à se raidir. Puis, je sombrai dans un sommeil sans fin.
Chap. 3
Jour suivant. 15:48
Tandis que le sommeil refluait de mon corps, je repris peu à peu connaissance et ouvris les paupières. J’étirai mes membres engourdis jusqu’à ce que je remarque où j’étais. En effet, cette pièce ne ressemblait pas à ma chambre et je ne dormais pas sur mon lit. Celui-ci était deux fois plus grand et possédait des draps d’un blanc comme la neige. Ils sentaient le frais avec un parfum de fleur. La salle ne comportait que quelques meubles dont un canapé avec des habits posés dessus et un miroir. Repoussant mes couvertures, je poussai un cri de surprise. Ma peau avait pali et je possédais maintenant deux tatouages. Celui sur mon poignet gauche disait “Be Brave“ et j’en avais un autre sur ma hanche, toujours du même côté, où l’inscription “Rotten to the core“ était dessinée. Je me levais et me dirigeais vers le miroir pour évaluer l’incident. Comment cela avait-il pu se produire ?
Arrivant devant mon reflet, je ne me reconnus pas. On aurait dit que j’avais changé de corps. Je possédais la même silhouette qu’avant, mais des changements apparaissaient nettement. Mes cheveux, auparavant noirs, étaient teintés de violets sur les pointes ; ma bouche avait rosi ; et mes yeux bleus avaient un aspect argenté et irréel.
N’étant vêtu que de sous-vêtements, je pris les affaires laissées sur le sofa et constatai qu’ils étaient à ma taille. Il y avait un pantalon noir troué avec style, une brassière accrochée derrière par un entrelacs de fils, un manteau en cuir et des Vans, tout de la même teinte sombre. Le contraste entre le blanc et le noir faisait ressortir ma peau et mes tatouages ainsi que les mèches violettes.
Une fois habillée, je pris mon courage à demain et ouvrit la seule porte de la chambre. Suivant un dédale de couloirs, j’arrivai enfin au salon, où se tenait une personne que je voyais de dos. Toutefois, je la reconnus facilement. On ne pouvait pas se tromper sur son identité. Ses cheveux verts étaient un indice suffisant.
- Je vois que tu es réveillée, lança-t-elle.
- Co… comment vous le savez ?
- Tu n’es pas particulièrement discrète.
Ces mots me firent l’effet d’une gifle et des souvenirs sur ce qui m’était arrivée resurgirent dans ma tête. Je revoyais cet homme me faire inhaler son poison et puis, le trou noir. Une peur s’en précédant s’insinua à l’intérieur de moi.
- Qu’est-ce que vous m’avez fait ? demandai-je d’une voix que je voulais calme et maîtrisée.
- Oh rien de particulier, à vrai dire. Juste quelques changements, c’est tout.
- C’est tout ? m’écriai-je d’une petite voix fluette. J’ai des tatouages sur ma peau et des cheveux violets.
- Tout comme moi.
- Alors c’est ça ! Vous voulez que je vous ressemble. Pourquoi ? fis-je en reprenant mon sang-froid.
- Il y a une raison logique, éluda-t-il.
- Laquelle ?
- Je suis ton père !
- Vous vous croyez dans un remake de Star Wars ou quoi ?
- Ne me crois pas si tu le veux, mais c’est la vérité.
- Et pourquoi je vous croirais ? Vous êtes le Joker après tout ! rétorquai-je.
- Je vois que ma réputation m’a précédée, fit-il. HAHAHAHAHA !
Son rire se répercuta sous ma chair, débloquant une horde de souvenirs lointains. J’avais déjà entendu ce rire quelque part pendant qu’une jeune femme blonde me tenait entre ses bras. Cependant, il y avait quelque chose de particulier dans sa chevelure. Des touches de bleus et de rouges perçaient sa couleur platine. Je frissonnai en l’identifiant.
- Si vous êtes mon père, ma mère, c’est Harley Quinn ? le questionnai-je.
- En effet. Tu me crois, donc ?
- Je n’ai jamais dit ça ! ripostai-je. Pourquoi maintenant ?
- Pourquoi quoi ?
- Pourquoi me le dire que maintenant si c’est la vérité ? Vous étiez trop occupés à tuer des gens ?
- HAHAHAHAHA ! J’aime bien ton sens de l’humour, petite. Mais, à vrai dire, ta mère m’avait cachée de toi.
- On se demande pourquoi ! Vous êtes un tueur en série ! Et ne m’appelez pas “petite“.
- Primo, tu ne me connais pas. Deuxio, je fais ce que je veux et si j’ai envie de t’appeler “petite“, je le ferais, c’est mon droit après tout, étant ton père et tout le blabla. Tertio, fait attention à ce que tu dis, je ne suis pas vraiment clément avec les gens qui me cassent les pieds mais je fais une exception pour toi, juste aujourd’hui. N’oublie pas qui je suis.
- Vous ne savez pas qui je suis, non plus, soulignai-je en chuchotant.
- Et c’est très regrettable d’ailleurs ! Dès que j’ai appris que tu existais, je me suis mis à ta recherche.
- Vraiment ? lâchai-je sans le vouloir.
- Oui, fit-il en articulant avec soin.
Il dégageait de lui un certain charme irrésistible et une incroyable confiance en soi. J’avais l’impression d’être en sécurité avec lui. Je sais que ça paraît dingue vu qui il est, néanmoins, il donnait cette sensation de bien-être.
Reprenant mes esprits, je détachai mon regard du sien, bleu électrique, et me détournai de lui. Des similitudes étranges apparaissaient entre nous. Les cheveux noirs, les yeux bleus et mon sarcasme tranchants. J’avais beau me convaincre qu’il ne disait qu’un tissu de mensonges, tout au fond de moi, je pensais le contraire.
Arrivant à la porte d’entrée, je sortis de la maison et plongeai dans le boulevard, éblouie quelques instants par la lumière du soleil, sans qu’il ne vienne m’arrêter ou pire me tuer délibérément. “Je me trompais peut-être sur son compte ? “ songeai-je alors je marchai le long des rues.
Chap. 4
Le même jour. 19:22
Lorsque je rentrai chez moi, je découvris le chaos. La police était postée à l’entrée de ma maison et devant chez les Fried. L’avenue était sens dessus dessous à cause de ma disparition. Ils allaient avoir un choc en me voyant, tout d’abord parce que je revenais mais aussi à cause de ma transformation. Mes parents allaient piquer une crise en repérant mes tatouages et je ne pouvais les cacher à cause de ma brassière qui laissait tout voir.
Une fois à l’intérieur de la villa, j’entendis des voix dans la cuisine et m’approchai lentement de celle-ci. Quand mes parents m’aperçurent, ils adoptèrent un visage où se reflétait le soulagement, la colère, et enfin la surprise. Le policier avec qui ils parlaient se tourna à son tour et rangea son calepin.
- Bon, Mr et Mme Cliff, puisque vous avez retrouvés votre fille, vous n’avez plus besoin de nos services. Elle a dû fuguer ou s’endormir chez une amie. Et étant donné qu’elle n’a pas dépassé le délai des quarante-huit heures, nous ne pouvons rien pour vous, désolé.
Sur ses paroles, il partit et quelques minutes plus tard, les voitures de police quittèrent la rue. Mes parents, qui avaient détournés leur attention de moi, me jetèrent un regard condescendant.
- Où étais-tu, jeune fille ? Tu nous dois quelques explications, dit ma mère d’une voix forte. Et pas de mensonges. Et puis, c’est quoi ces tatouages ? Tu as intérêt à avoir une bonne justification !
- Maman, fis-je d'une voix rauque. Je dois te poser une question.
- Est-ce vraiment nécessaire ?
- Oui, chuchotai-je. Puis parlant plus fort : Est-ce que j'ai été adopté ?
- Quoi ? hoqueta ma mère en affichant un air d'étonnement mêlé à de la peur.
- Il est temps de lui dire la vérité, Iris, annonça mon père qui n'avait pas dit un mot. A mon avis, elle est déjà sur la voie.
- Alors c'est vrai ?! m'écriai-je soudainement. Je ne suis pas votre fille.
- Si, tu es notre fille. Nous t'avons élevée et aimée comme notre fille, expliqua-t-il.
Ces mots firent gonflés mon cœur de joie mais trop de mensonges étaient dissimulés derrière ses paroles. Pourquoi me mentir s’ils m'aimaient ?
- Qui sont mes parents ? demandai-je de but en blanc.
- Non, ne nous demande pas ça, fit ma mère qui avait blêmi.
- C'est le Joker, c'est ça, et Harley Quinn ?
- Oui, souffla mon père. Nous t'avons trouvé sur le pas de notre porte, une nuit, avec un mot. Il disait que tu étais leur fille mais que ta vraie mère ne pouvait supporter une telle responsabilité. Alors elle t'a laissé ici pour que nous prenions soin de toi. Nous avions toujours voulu d'un enfant et malgré tes parents biologiques, nous t'avons accepté.
- Pourquoi me l’avoir caché ? le questionnai-je.
- Pourquoi ? répéta ma mère. Ce sont des monstres qui tuent de sang-froid. Nous ne voulions pas de ça pour toi.
- Et ça justifie tous vos mensonges ?
- C'était pour te protéger, cria-t-elle.
- Me protéger de quoi ? D’eux ? Ils ne me feront pas de mal. Il ne m'en a pas fait, répliquai-je.
- Quoi ? Tu l'as vu ? fit ma mère, abasourdie.
- Là n'est pas la question, m'emportai-je en me réfugiant dans ma chambre.
J'avais pris ma décision. Je bloquais la porte de ma chambre avec une chaise et fouillai dans mes affaires à la recherche de choses à emmener avec moi. Cependant je ne voulais pas me rappeler cette vie-là. Une vie de mensonges et de haines envers des personnes qui ne le méritaient pas forcément. Alors je partis par la fenêtre sans me retourner, le cœur léger.
Parcourant le jardin en me baissant devant les fenêtres, je constatai qu'une voiture gris métal était garée devant mon allée. Lorsque je lus la plaque d'immatriculation, je sus à qui j'avais à faire. Je me dirigeais vers l'habitacle et ouvrit la portière.
- Bonjour, fit le Joker. Tu as besoin d'un chauffeur ?
- Oui, merci, répondis-je en prenant place, côté passager.
Puis, il démarra et je fus plaquée contre mon dossier. Nous roulions si vite que mon cœur se mit à battre la chamade. Je m'agrippai à la poignée mais cela ne me réconforta pas. Nous slalomions entre les autres véhicules avec aisance. Néanmoins, je ne pus retenir des petits cris de détresse.
- Non mais..., commençai-je mais mes mots se perdirent dans ma gorge.
- Il faut me faire confiance, dit-il. Et s'amuser un peu. HAHAHAHAHA !
Il ne s'arrêtait que lorsque nous atteignîmes la maison que j'avais quitté quelques heures plus tôt. Nous fûmes accueillis par une belle femme qui me ressemblait comme deux gouttes d'eau. Harley Quinn. Ma mère. J'étais exactement comme elle, physiquement, à part mes cheveux noirs, mes yeux que je tenais de mon père et ma taille. Je faisais une tête de plus qu'elle lorsqu'elle ne chaussait pas ses talons.
- Bienvenue à la maison, ma chérie, me dit-elle de sa voix douce. Suis-moi, je vais te montrer ta chambre.
Je la suivis dans un dédale de couloirs pour découvrir la pièce dans laquelle je m'étais réveillée aujourd'hui. Elle était simple, signe d'un nouveau départ. Et j'étais prête à commencer ma nouvelle vie.
Chap. 5
Le même jour. 19:58
- Isabelle ! Isabelle ouvre cette porte ! cria Mme Cliff en toquant à la porte de sa fille.
- Gérard, viens m'aider ! fit-elle en cause de désespoir.
Quand son mari l'eut rejoint, il enfonça la porte pour découvrir une chaise cassée et une chambre vide. Ils comprirent à l'instant où ils virent la fenêtre toujours ouverte. Le cœur d'Iris Cliff se brisa quand elle découvrit que sa fille était partie. Elle l'avait élevée après tout et l'aimait de tout son être. Mais elle avait conscience du mauvais choix qu'elle avait fait.
- Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? demanda son mari.
- On fait ce qu'on aurait dû faire plus tôt, lui répondit-elle.
- C'est à dire ?
- Dévoiler la vérité, dit-elle dans un soupir.
Le lendemain, des affiches étaient placardées dans toute la ville.
Chap. 6
Le lendemain. 7:30
Tandis que je me réveillais pour commencer une nouvelle journée de cours, je me surpris en train de rêvasser sur la vie que je voulais. Un bruit à ma porte m'interrompit et je me retournai vers ma mère.
- Bonjour, bien dormi ? me demanda-t-elle.
- Oui, merci.
- Tiens, voici un sac pour ton lycée. Tu y trouveras des affaires pour écrire et des cahiers, fit-elle en me tendant un sac noir.
- Oh merci. Ça veut dire que le Joker à accepter ma proposition ?
- Oui mais ton père est très inquiet, quand même.
- Pourquoi ? la questionnai-je.
- Je ne sais pas vraiment. Ton petit déjeuner t'attend.
Quelques minutes plus tard, j'étais habillée comme hier, n'ayant d'autres vêtements à mettre, et je commençai à manger des gâteaux pendant que ma mère s'affairait dans la cuisine. Puis, le Joker nous rejoignit et piqua un gâteau à la belle femme.
- Est ce que tu veux que je te conduise au lycée ? me proposa-t-il.
- Euh non, ça va aller.
- Tu sais conduire non ?
- Oui, je viens d'avoir mon permis. J'ai eu 16 ans il y a...
- Il y a 5 mois, m'interrompit ma mère. Tu es ma fille, ce n'est pas un truc qu'on oublie.
- Alors je peux te laisser une de mes voitures, fit mon père en posant une clé sur la table.
- Euh... merci, dis-je en souriant.
Ayant fini de manger, je pris les clés et sortis en emportant mon sac à dos. La voiture m'attendait devant le garage. Une fois installée, je démarrais et constatais que c'était un bijou super facile à conduire. J'arrivai au lycée en à peine cinq minutes.
Quand je sortis de l'habitacle, tous les regards étaient tournés vers moi. Ce devait être l'effet de la voiture comme dans 17 ans encore lorsque Zac Efron sort de sa berline et que les filles se retournent sur son passage avec des yeux de merlan fris. Cependant les gens avaient des visages qui exprimaient soit la crainte, soit la fureur.
Je continuai mon chemin sans faire attention à eux. C'est alors que je fus stoppée dans mon élan par une affiche me représentant aux côtés du Joker et d'Harley Quinn. C'était une vieille photo de moi, une des rares que l'on pouvait retrouver sur internet. Les yeux écarquillés, je me demandai comment cela avait pu arriver.
- Sale monstre, cracha une personne dans mon dos.
- Pardon ? fis-je.
- Tu es un monstre, répéta-t-il. Vu les parents que tu as, c'est normal.
Puis, je fus une chose qui me surprit tout autant que le garçon qui se trouvait face à moi. Je lui bondis dessus et lui décocha un poing dans le visage. Malheureusement, il l'évita et je me pris un coup dans le ventre. La respiration coupée, je ne sentis le coup suivant que lorsqu'il m'atteint à la tempe. Je tentais de riposter mais mes yeux se brouillaient et je voyais noir. Puis, je me retrouvai par terre, me tordant de douleur, tandis que des rires retentissaient autour de moi. Le garçon allait me mettre un coup de pied lorsqu'un individu l'arrêta.
- Hey, ça suffit !
- Tu la défends ? demanda le garçon
- Non, mais si c'est vraiment ses parents, tu risques d'être mort. Comme vous tous d'ailleurs ! rétorqua l'inconnu.
A ses mots, tout le monde se dispersa sauf lui. Il m'aida à me relever et m'emporta à l'infirmerie où il n'y avait personne. Il entreprit de me soigner, fouillant dans les tiroirs, et prit de la glace qu'il plaça contre ma tête endolorie.
- Pourquoi tu m'as aidé Rémy ? demandai-je, coupant court au silence.
- Est ce que c'est vrai ? fit-il en éludant ma question.
- Oui, ce sont mes vrais parents, répondis-je.
- Changer de parents ne change pas une personne, c'est pour ça que je t'aide, expliqua-t-il, après un long silence.
- Qu'est-ce que tu as contre eux ?
- Contre Harley Quinn, rien. À part peut-être le fait qu'elle suit le Joker comme son ombre. Et contre lui, beaucoup. Il a tué mon père.
- Oh, je ne savais pas. Je pensais que David était ton père.
- Tout le monde le croit. Ma mère s'est remariée avant que je connaisse les jumeaux et donc avant que je te connaisse aussi.
- Oh je suis désolée, dis-je.
- Ne le sois pas, t'y es pour rien. En tout cas, tu vas avoir un méchant bleu sur la joue droite.
- J'imagine que je l'ai bien méritée.
- Non, c'est faux. Il t'a cherché. Mais promets-moi quelque chose.
- Oui ? fis-je, intriguée.
- N'oublie pas qui ils sont, même si ce sont tes parents biologiques.
- Promis.
Nos regards se croisèrent et il me sourit gentiment. Je devais lui faire pitié avec mon teint blême et mes hématomes aux visages. Il approcha sa main pour remettre une mèche de cheveux derrière mon oreille et m'observa attentivement. Échappant à son regard qui me mettait mal à l'aise, je lui demandai :
- Tu crois qu'ils pourront changer pour moi ?
- Je n'en sais rien, Isabelle. Mais toi, ils t'ont un peu changé.
- Comment ça ? Tout à l'heure, tu disais le contraire, ripostai-je.
- Oui, moralement parlant. Mais physiquement, tu as changé. Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ?
- Rien de très grave, éludai-je.
- Oui mais tu ne pourras plus jamais les enlever, n'est-ce pas ?
- Je ne sais pas, Rémy.
Nous nous fixâmes attentivement jusqu'à ce que je détourne le regard. Le sien était empreint d'un éclat particulier, qui me troublait profondément. Je ne parvenais pas à trouver les mots pour le décrire. Et cela me frustrait énormément.
- Tu veux que je te ramène chez toi ? me proposa-t-il. En plus, tu as le look des motards.
- Euh... c'est un compliment ? En fait, je n'ai plus vraiment de chez moi maintenant, dis-je d'un air triste. Et puis, je préfère la voiture à la moto, mais merci pour la proposition, ajoutai-je.
- D'accord, c'est toi qui décides. Eh oui, c'était un compliment, enfin pour moi, fit-il avec un sourire.
Ces mots me firent chaud au cœur. Il avait réagi comme je l'avais souhaité, c'est à dire sans une once de pitié ou de compassion dans ses paroles. Poussée par une impulsion, je l'étreignis, passant mes bras autour de sa nuque. Il resserra les siens sur ma taille tandis que nous nous laissions emporter dans notre étreinte.
Chap. 7
Le même jour. 8:19
Tandis que Rémy allait en cours, je me réfugiai dans la voiture qu'on m'avait prêtée. Une fois bien installée dans le siège, je m’effondrai intérieurement et donnai des coups dans le volant, me défoulant autant que j’avais d’énergie à revendre.
Je n’avais jamais souhaité que cela arrive, d’être rejetée et jugée en fonction de ma famille. Je n’avais jamais ressenti un tel vide dans mon cœur, un vide qui me rendait triste et malheureuse. Un vide qui m’empêchait d’avoir un quelconque espoir. Car mon monde venait de s’ébranler. De changer. De prendre une tournure à laquelle je n’étais pas préparée. Et je ne savais plus quoi faire.
Chap. 8
Deux jours plus tard. 7:48
J’arrivai au lycée, plus confiante et sûre de moi que lorsque je l’avais quitté deux jours plus tôt. Tandis que les élèves me regardaient avec frayeur ou colère, je relevai la tête, un air de défi dans le regard, continuant ma route tranquillement et ignorant les commentaires mesquins de certains. Lorsque j’atteignis enfin la porte de ma classe, mes camarades s’empressèrent de jeter leurs sacs sur les chaises, afin que je ne vienne pas m’asseoir à leur côté. Seulement, je m’en fichais pas mal. Je n’avais pas besoin d’eux, ni de leur charité. Je m’assis dans le fond, seul, mais avec un immense sourire qui fit frissonner les personnes devant moi. J’inspirai la crainte aux alentours, et j’allai mettre cet atout à profit.
Puis, mes amis entrèrent à leur tour et mon sourire se crispa. Quand je croisai le regard de Clémence, ma confiance s’effondra. Elle m’observait avec dégout et mépris, ainsi que Jordan et Jason. Seul Rémy avait une certaine compatie et gentillesse dans le regard, néanmoins de la pitié se dégageait aussi de son attitude. Et je ne voulais absolument pas de sa pitié. Encore moins de lui qui avait été si réconfortant, l’autre jour. Je ne voulais pas être considérée comme une pauvre petite chose fragile et sans défense. Cela renforça ma colère et mon assurance.
Soudain, il vint vers moi et s’assit à la table voisine.
- Tu ne devrais pas t’asseoir là ! l’avertis-je.
- Et alors ? Je fais ce que je veux, affirma-t-il.
- Ok, tu verras bien ce qu’il t’arrivera !
Puis, la sonnerie retentit et le cours commença. Les mathématiques ont toujours été ma matière préférée mais ce jour-là, ma vision des choses avait changées. Lorsque je levai la main, on ne m’interrogeait jamais. Le professeur me dévisageait d’un air étrange puis l’instant d’après, faisait comme si je n’existais pas. Mon ego en pris un coup. Et ma fureur envers ce monde horrible et malfaisant ne fit qu’augmenter.
Chap. 9
Le même jour. 16:00
Après m’être isolée, ou du moins essayée, la réalité m’a rattrapé. Et me voilà au beau milieu d’un combat. Bien sûr, c’était ma fierté qui m’avait poussée à accepter ce défi. Malheureusement, je me faisais laminer, en beauté, et je n’en étais pas très fière.
Le garçon contre qui je me battais, un gros dur soit dit en passant, balançait ses coups sans que je ne les voie ou puisse les esquiver. Et bientôt, je me retrouvai par terre, grimaçant de douleurs, le sang coulant sur mon visage. Autant dire que ce n’était pas beau à voir. Tandis que je gémissais, j’entendis vaguement les cris de victoire autour de moi.
- Sale monstre ! lança quelqu’un dans la foule. Tu es une moins que rien.
Puis, elle se dispersa, me laissant seule face à mon malheur.
- Allez viens ! fit une voix masculine que je connaissais très bien.
Rémy me souleva et m’aida à marcher jusqu’à sa moto.
- Tu arriveras à rester dessus ? me demanda-t-il gentiment.
J’acquiesçai, incapable de prononcer un mot, tellement le goût de bile dans ma bouche était affreux. Nous ne mîmes que quelques minutes pour arriver chez lui. C’est alors qu’il entreprit de me soigner avec des gestes précis et doux. Il désinfecta mes plaies, appliqua un baume réparateur sur mes hématomes et referma mes coupures avec des pansements.
- Pourquoi tu fais tout ça ? Alors que les autres me tournent le dos ? lui demandai-je.
- Je te l’ai déjà dit, fit-il, concentré sur mes blessures.
- Pas clairement, répliquai-je.
- Écoute Isabelle, dit-il en plongeant son regard dans le mien, tout à coup très sérieux. Les gens ne remarquent pas ce que je vois à l’intérieur de toi : une jeune fille aimée et aimante, patiente et à l’écoute des autres qui veut toujours aider lorsque quelqu’un en a besoin, mais je vois aussi une personne forte, courageuse et intrépide, qui affronte ses problèmes la tête haute. Et ce n’est pas en changeant de vêtements ou de famille qui va changer ce que tu es. Alors pourquoi je te tournerais le dos ? Pourquoi je tournerai le dos à quelqu’un d’aussi formidable que toi ? Surtout que… je t’aime bien Isabelle.
A ces mots, je rougis et baissai la tête. Cependant, il la releva en m’attrapant le menton d’un geste délicat et remit en place une mèche de cheveux rebelle derrière mon oreille.
- Tu sais, j’adore quand tu rougis, chuchota-t-il.
Et il m’embrassa. Lorsque ses lèvres rencontrèrent les miennes, le vide que j’avais ressenti disparu et mon corps s’embrasa. Le baiser, d’abord doux et tendre, s’intensifia et devint de plus en plus fougueux et passionné.
Chap. 10
5 jours plus tard. 10:00
Cela faisait bien une semaine que les gens me rabaissaient sans arrêt, mais je vivais sur un petit nuage depuis que Rémy m’avait embrassée. J’essayais de rester la plus discrète possible quand j’allais au lycée et aussi de parler avec mes parents, mes quatre parents. J’avais compris pourquoi mes parents adoptifs avaient agi comme ils l’avaient fait, pour me protéger. Toutefois, j’avais du mal avec le fait que mes vrais parents soient des fugitifs. De plus, je ne les voyais pas souvent, vu que la police surveillait mes moindres faits et gestes.
- Salut, me fit Rémy en déposant un baiser sur mes lèvres. Encore dans les nuages ?
- Non, je réfléchis juste, lui répondis-je.
- Tu réfléchis trop, je vois les rouages de ton cerveau s’activer. Il faut que tu te détendes.
- Mais comment avec tout ce qui se passe ? lui demandai-je.
- J’ai quelques idées, dit-il avec un sourire espiègle.
- Très drôle ! le taquinai-je.
- Mais tu as besoin de rire, depuis tu sais, que les filles ne sont plus là, fit-il d’un air triste.
- Je ne veux pas de ta pitié, Rémy, pas en ce moment. Oui, mes amies m’ont laissé tomber, mais je n’ai pas envie que tu fasses pareil. Je veux être perçue comme quelqu’un de normal, pas un monstre car mes parents sont des méchants.
- Eh, eh, je suis là, fit-il en m’entourant de ces bras. Et je ne te laisserais jamais seule.
- Merci, dis-je avec un petit sourire.
- Allons en classe, déclara-t-il lorsque la sonnerie retentit.
Je m’installais encore au fond, pour ne pas voir les visages furibonds de mes camarades, et aussi parce que les professeurs ne m’interrogeaient jamais. Eh oui, ma vie avait changé du tout au tout depuis que j’étais dans la une des magazines. Et croyez-moi, je le vivais de plus en plus mal.
Chap. 11
Le lendemain. 15:55
Assise en cours et attendant la sonnerie, je regardais l’horloge qui se faisait un plaisir de me tourmenter. Cinq minutes plus tard, même si pour moi cela faisait plutôt un quart d’heure, la sonnerie se fit entendre. Je me précipitais dehors afin de ne pas avoir à affronter mes camarades. Malheureusement, je n’y parvins pas comme les autres jours et je dus m’arrêter devant un groupe de garçon.
- Alors comme ça, tu veux fuir ? Sale lâche, fit le plus grand.
- Oui, tu as peur de nous ou quoi ? lança celui à sa droite.
- Non, j’en ai juste marre, répondis-je énervée.
- Oh, comme ça, elle s’énerve.
- Elle a un prénom ! m’écriai-je, brulante de rage.
- Ah oui, tout ce que je sais, c’est que tu es la fille du Joker ! dit le dernier qui a parlé en me crachant à la figure.
Et le combat reprit. Je me pris des coups de partout et essayais de riposter, mais je ne faisais qu’aggraver les choses. Je finis par terre, du sang coulant le long de mon nez. J’entendis des pas approcher et je me recroquevillais sur moi-même, craignant encore des coups.
- Hey, ça va ? Tu peux bouger ? me demanda Rémy.
- Je pense. Tu n’aurais jamais dû voir ça !
- Et toi, tu n’aurais pas dû te mettre en colère !
- J’hallucine ! Tu as vu comment ils m’ont traité ?
- Oui, mais tu les as provoqués, fit-il.
- C’est une blague ?
- Non, enfin Isabelle regarde bien ce que tu as fait. Tu n’aurais jamais dû faire…
- Dégage !
- Pardon ?
- Dégage, c’est clair ! Je ne veux plus te voir !
- Très bien, dit-il furieux.
Et il partit, loin de moi.
Chap. 12
Le lendemain. 15:55
Arrivant chez mes parents biologiques, je les cherchais à travers l’immense maison qui était la leur.
- Bonjour, criai-je pour me faire entendre.
- Oh hey, me fit ma mère, en sortant de la voiture. Comment vas-tu ?
- Ça va, répondis-je sèchement. Où est mon père ?
- Euh… comment dire… il travaille.
- Ça veut dire quoi ça ? Qu’il est en train de tuer quelqu’un ?
- Euh… disons que c’est possible.
- J’y crois pas, m’exclamai-je hors de moi. Je ne peux pas continuer comme ça. Vous ne pouvez pas tuer comme bon vous semble. Mes camarades ont raison de se méfier de moi et de vous par la même occasion. Vous êtes des meurtriers !!
Et je partis comme une furie vers la sortie. Malheureusement, je tombais sur mon père qui rentrait, sa chemise emplie de sang. Alors je fis la seule chose rationnelle sur le moment, je le giflais de toutes mes forces. Il fut choqué et pris au dépourvus.
- Vous devriez être en prison ! criai-je avant de m’en aller, sans me retourner pour voir leurs visages.
Chap. 13
Trois jours plus tard. 9:30
Cela faisait plusieurs jours que je n’allais plus à l’école. Mes parents avaient compris quand ils m’avaient vu le visage tuméfié et les côtes cassées. Du coup, j’en profitais pour me morfondre dans mon lit à regarder des films et des séries. C’est alors que j’entendis la porte sonner.
- J’y vais ma chérie, fit ma mère adoptive d’en bas.
Ça tombait bien, j’avais la flemme de me lever. A vrai dire, je me levais juste pour manger et aller pisser, sinon je restais sous ma couette.
- Isabelle, c’est pour toi ! entendis-je ma mère criée, me sortant de mes pensées.
C’était très bizarre. Je n’avais plus de visiteurs depuis plusieurs jours. Pensant que c’étaient mes autres parents, je descendis et fus prise de court par la vision que j’avais. Rémy se tenait dans l’entrée de ma maison.
- Euh… salut, me fit-il d’une petite voix.
- Salut, répondis-je sèchement.
- Je voulais m’excuser pour l’autre jour.
- Et ça t’a pris trois jours ?
- J’étais un peu énervé que tu m’aies rejeté comme ça et que tu m’évitais en n’allant pas au lycée, expliqua-t-il, gêné. Mais je me suis rendu compte de mon erreur. Je n’aurais jamais dû.
- En effet !
- Et j’espère que tu pourras me pardonner, même si c’est dans plusieurs années. Je l’ai bien mérité, après tout !
- Je… Je vais y réfléchir, lui dis-je sincèrement.
- Merci, fit-il reconnaissant. Oh et aussi, j’imagine que tu n’as pas vu la une du jour ?
- Non, j’évite de regarder les journaux en ce moment, déclarai-je.
- Je pense que tu voudras regarder celle-ci, lança-t-il en posant un journal sur une étagère près de lui. Bonne journée !
Et il partit, me laissant dubitative. Je m’approchais du l’étagère, indécise. Ma mère qui nous avait laissés seuls, revint et pris le journal dans ces mains. Elle lut attentivement la première page puis laissa échapper une exclamation de surprise.
- Quoi ? fis-je, inquiète.
- Tu devrais voir par toi même !
Super ! J’étais beaucoup avancée. Je lui pris le journal des mains et lus l’article. Je fus sans voix, choquée par ce que je lisais. Je n’arrivais pas à le croire. Cela changeait tout ! Contrairement à ce que je pensais, ils tenaient à moi.
Voyez par vous-même, le titre est assez éloquent : LE JOKER ET HARLEY QUINN SE SONT RENDUS POUR « LEUR FILLE ».
Si vous aussi êtes choqués, demandez-vous ce que je dois ressentir en ce moment. Eh bien, je vais vous le dire : un méli-mélo de sentiments que je n’arrivais pas à démêler. Je faillis m’effondrer mais ma mère m’a soutenu à la dernière minute, m’empêchant de tomber. Tout venait de changer. Après rester à voir si c’était en bien ou l’inverse !
Chap. 14
Le lendemain. 7:42
Dès lors que j‘arrivais au lycée, une horde d’adolescent se précipita vers moi, m’acclamant comme si j’étais une héroïne. Ce que je n’étais pas ! Je fus quelque peu choquée. C’était tellement inattendu ! Le jour d’avant, ils restaient le plus loin de moi et maintenant, ils m’acclamaient. Personne ne trouvait ça bizarre ?
- J’y crois pas ! Comment tu as fait ça ? me lança une fille.
- Fait quoi ? demandai-je, ne sachant pas de quoi elle parlait.
- Arrête de nous faire marcher ! On veut tout savoir ! me dit une autre.
- Non mais je ne vois pas de quoi vous parler ! répliquai-je.
- De ça ! fit encore une autre en me montrant le journal d’hier.
- Oh, je ne sais pas trop.
- Arrête de faire la modeste, on t’admire, tu sais, d’avoir eu le courage de te battre contre tes parents !
- Euh…
Heureusement, Rémy intervint et je n’eus pas à finir la fin de ma phrase. Il chassa la foule qui m’entourait, recevant en retour des grognements.
- Merci, lui fis-je avec un sourire.
- De rien. Alors comme ça tu as lu le journal que je t’avais passé ?
- Oui, tu me connais. Je suis trop curieuse !
- Oui. Les gens ont changé depuis hier. Ils ne te voient plus comme la méchante.
- Oui, ce n’est pas trop tôt !
- En effet. Ils s’en sont enfin rendus compte ! Ça leur a pris pas mal de temps. Désolé pour tout ce que tu as enduré.
- Tu n’as pas à t’excuser pour ça, lui dis-je sincèrement.
- Je sais mais je tenais à le faire quand même. Je n’ose même pas imaginer ce que ça a dû être.
- Ouais, n’essaye pas.
- J’espère que maintenant, tout va aller pour le mieux !
- Oh, moi aussi. Tu n’imagines pas à quel point !
- Entre nous aussi, je veux dire, avoua-t-il, un tantinet gêné.
- Oh… je l’espère aussi, admis-je à mon tour.
- Plus rien ne sera comme avant, déclara Rémy d’une petite voix.
- Non, mais c’est peut-être une bonne chose !
Chap. 15
Le jour même. 17:03
J’entendis la grille sonner avant de la voir s’ouvrir. La salle était grande et bien gardée. Il devait y avoir au moins 10 gardes dans celle-ci et bien le double devant la porte, ainsi que des caméras de partout. Eh bien entendus, encore plus dans tous l’enceinte du bâtiment et dehors. Eh bien, ils ne rigolaient pas ici. Puis, je les vis approcher, en combinaison orange délavé mais toujours avec leur air un tantinet fou. Je commençais à bien aimer ce petit air, qui ne me faisait pas peur contrairement à d’autres.
- Salut, fis-je d’une voix enrouée par les sentiments.
- Hey, me répondit ma mère. Comment vas-tu ?
- Mieux, merci.
Puis, je me tournais vers mon père. Il avait encore la marque de ma main. Je me sentais assez mal à l’aise en le voyant.
- Désolée de m’être emportée, lui dis-je. Et pour la gifle aussi.
- Ça fait du bien d’en recevoir une de tant en tant, lança-t-il en rigolant.
- Je suis si contente que tu sois là, déclara ma mère.
- Moi aussi. Je voulais vous remercier pour ce que vous avez fait pour moi, avouai-je.
- Ton père était un peu contre, mais j’ai su le convaincre.
- Mais tu sais, on ne restera jamais ici très longtemps, me prévins-t-il.
- Je sais.
- Et tu sais aussi qu’on ne peut pas rester dans les environs, une fois libre.
- Oui, je sais, répétais-je, tristement.
- C’est pour te protéger. Tes camarades ont enfin compris que tu n’étais pas comme nous ?
- Oui. Ils me voient un peu comme une héroïne. C’est très bizarre.
- Profites-en ! Tu le mérites ! me dit mon père. J’ai été ravi de faire ta connaissance.
- Moi aussi, fis-je en retenant mes larmes. Adieu !
- Adieu, me lança ma mère. On est désolé de ne pas être les parents idéals.
- Vous n’avez rien à vous reprocher, je les rassurais.
Puis, je partis, les larmes aux yeux, sachant que je ne les reverrais jamais. Je savais que c’était pour le mieux, mais je n’arrivais pas à me faire à cette idée. Après tout, ils étaient mes vrais parents et ce qu’ils avaient fait pour moi montrait à quel point ils tenaient à moi. La seule chose positive était que j’allais retrouver un semblant de vie normale. Eh oui, je garderais à vie mes tatouages et ma peau de porcelaine. Mais au moins, il me resterait quelque chose du Joker et d’Harley Quinn : un souvenir à vie.
FIN.
Crédit photos : Pinterest
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