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Fiction - La fille qui était brisée


Chapitre Un.


Il y a cette fille, assise seule au fond de la classe, que je remarque dès que j’entre dans la salle. Elle est belle, mais a l’air triste. Je suis intrigué. D’habitude, les gens cachent leurs émotions sous des couches afin de paraître parfait aux yeux de la société, et aussi pour faire semblant qu’ils n’ont pas de problèmes même pour eux. Mais cette fille est différente. Je le sens.

Je m’assis à côté d’elle. Elle ne tourne la tête qu’une seconde pour me détailler de la tête au pied, puis se détourne et se perd dans ses pensées. Comme j’aimerais lire en elle, en cet instant. J’aimerais tous connaître d’elle, et surtout ce qui la rend si malheureuse. Mais je n’en ai pas le temps, car notre professeur arrive et le cours commence.

***

A la fin du cours, je me précipite après elle, dans le couloir.

- Comment tu t’appelles ? je lui demande de but en blanc.

- Pourquoi veux-tu le savoir ? me rétorque-t-elle d’une voix dure.

- Étant donné qu’on va passer l’année ensemble, je me suis dit que ça serait sympa de savoir ton prénom, et j’aurais préféré qu’il vienne de toi, plutôt que des autres, si tu vois ce que je veux dire, fais-je en m’en allant.

- Julie.

Puis, elle partit. Cette fille n’allait pas rendre ma vie facile. Parfait, je n’aimais pas les choses faciles. Je préférais les challenges. C’est beaucoup plus excitant !


 

Chapitre Deux.


Le lendemain, à la fin de la journée, je la suivis jusqu’à la sortie du bâtiment. Je l’ai rattrapé assez facilement et elle ne me cacha pas son mécontentement.

- Hey, je ne me suis pas présenté l’autre fois. Je m’appelle Noah.

- Okay, fait-elle en s’en allant.

- Attend !

- Quoi ? Je n’ai pas beaucoup de temps, Noah.

Elle avait dit ça d’une voix un peu chevrotante, comme si elle avait peur de quelque chose. Mais de quoi ?

- Je t’ai observé, tu sais.

- Et ?

- Et j’ai remarqué que tu ne faisais pas beaucoup confiance aux autres.

- Comment tu veux avoir confiance en des gens qui ne se préoccupent que de ce qui les intéressent ?

- Tu marques un point.

J’adorais sa franchise, surtout car elle avait le même point de vue que moi sur nos camarades. Néanmoins je répliquai :

- Car tu ne crois pas que tu es pareil ? Après tout, on est tous plus ou moins égoïste.

- Oui, plus ou moins.

Oui, c’était clair. Il fallait que je perce cette fille à jour. Elle était un mystère que je ne tardais de découvrir.


 

Chapitre Trois.


En classe, c’est moi qui faisais la conversation. Elle ne parlait presque jamais, à part pour répondre aux professeurs quand ils l’interrogeaient. Ce n’était pas une grande bavarde. Toutefois, quand je lui posais des questions, elle répondait. Vaguement, mais elle répondait. C’était déjà ça et c’étaient les plus beaux moments de la journée. Pendant les pauses, je restais avec elle. Au début, elle essayait de me chasser cependant elle avait vite compris que ça ne marcherait pas. Elle a tenté de fuir, néanmoins dès qu’elle faisait ça, je la suivais partout. Vous pouvez appeler ça comme vous voulez, mais moi j’appelle ça de la persistance.

Finalement, nous avons installé une sorte de routine, qui j’espérais, mènerait à ce qu’elle se livre à moi.


 

Chapitre Quatre.


Ce n’est que deux semaines plus tard, qu’elle se livra un peu à moi. Je continuais à suivre ma routine, lui laissant le libre choix de parler ou de m’écouter quand elle le voulait lorsqu’elle me surprit en prenant la parole de son plein gré.

- Qu’est-ce que tu veux à la fin ? me demande-t-elle en haussant la voix.

- Je veux savoir qui tu es, apprendre à te connaître.

- Crois-moi, tu ne veux pas savoir qui je suis.

- Et pourquoi ça ?

- Parce que je suis brisée, Noah, tu peux comprendre. Je ne suis pas quelqu’un de facile.

- Je le sais. Tu crois vraiment que je fais dans le facile. C’est pour ça que je t’aime bien.

- Tu ne devrais pas, justement. Je ne fais qu’être méchante avec toi, odieuse et…

- Oui, mais c’est parce que tu recherches à me repousser.

Elle resta bouche bée après mes paroles. Oui, j’avais touché dans le mille. Nous le savions tous les deux. Car ce qu’elle n’avait pas encore compris, moi je l’avais assimilé depuis bien longtemps. Depuis notre rencontre, en fait. A force de l’observer, de parler avec elle et de passer du temps avec cette fille qui me rendait littéralement dingue, j’avais fini par la percer à jour. Et malheureusement pour elle, elle et moi avions beaucoup de choses en commun.


 

Chapitre Cinq.


Depuis ce jour, elle me considéra différemment. Elle s’ouvra un peu plus à moi, me parlant de sa famille, un peu de son passé, sur lequel elle ne s’attardait jamais vraiment. En fait, elle n’allait presque jamais dans les détails, de peur que j’apprenne quelque chose qu’elle ne voulait pas divulguer. Et c’est depuis ce jour que nous sommes devenus vraiment amis. Elle savait qu’elle pouvait compter sur moi et moi sur elle bien que nous ne nous disions pas tout. Mais j’acceptais cette relation un peu bizarre sans me plaindre. Nous étions devenus de plus en plus proches physiquement aussi. En même temps, je passais mes journées avec elle, qu’avec elle et personne d’autre. Et j’en étais ravi.


 

Chapitre Six.


Un jour, nous eûmes notre première dispute, ce qui était plutôt dur.

- Je ne fais pas dans le romantisme, me dit-elle.

- Parfait, moi non plus, je réponds honnêtement.

- Mais tu attends quelque chose de moi et je ne peux pas te le donner.

- Quoi ? C’est ridicule. Tu crois pas que j’ai compris que tu te cachais de l’amour. Je ne sais pas encore la raison, mais je vais le découvrir et t’en libérer, même si ça prend une éternité.

- Tu t’entends parfois ! Pourquoi je me cacherais de l’amour ?

- A mon avis, tu as eu le cœur brisé.

- Et tu veux le réparer, c’est ça ? Mais mon cœur va très bien, et tu sais pourquoi ? Parce que je ne suis jamais sortie avec personne.

Cette révélation me rendit perplexe et je ne pus dire un mot de plus pendant quelques secondes.

- Jamais ? fais-je en retrouvant la parole.

- Jamais.

- Pourquoi ?

- Parce que.

- Parce que quoi ?

- Tu ne lâcheras jamais l’affaire, hein ?

- Jamais.

- Je ne suis pas le genre de fille à attendre.

- Attendre quoi ? Tu ne peux pas être plus précise, parfois ?

- J’en ai marre d’être prise pour une imbécile par les gens. Et de faire toujours le premier pas. Parce qu’au final, je suis toujours déçue. Tu parles aux gens par SMS, tu espères qu’ils vont te répondre et quand tu sais qu’ils ont vu le message et qu’ils ne répondent pas, bah moi j’aime pas ça. Je sais qu’ils ont autre chose à faire que de me répondre, mais me faire poireauter pendant cinq jours, je trouve ça déplacer.

Et elle partit, me laissant seul et quelque peu inquiet pour elle. Sans faire exprès, elle avait lâcher tout ce qu’elle avait sur le cœur et je ne savais pas comment elle allait réagir maintenant en ma présence. Je ne voulais pas qu’elle sorte de ma vie. Car même si elle ne parlait presque jamais d’elle, j’aimais être en sa compagnie.


 

Chapitre Sept.


Les jours suivants, elle ne m’adressa pas la parole, ce qui me peina énormément. J’avais eu l’impression que nous avions dépassé ce stade et que nous étions devenus amis. Mais je m’étais trompé. A chaque fois que je l’approchais, elle trouvait un moyen pour s’enfuir loin de moi. Je ne comprenais pas pourquoi elle faisait ça, elle n’avait fait que se dévoiler à moi, la personne la plus proche d’elle dans ce lycée. Et même si je savais que c’était un grand pas pour elle, elle ne devait pas avoir honte. C’est pour cela que je ne renonçais pas à elle et qu’un jour, je fis ceci.

Caché dans le placard d’entretien, dans le noir, je regardais par la porte entrouverte si par hasard elle passait par là. Alors que j’allais renoncer, je la vis enfin. Je soupirai de bonheur. J’allais pouvoir mettre mon plan en place.

Dès qu’elle passa près de la porte, j’attrapai son poignet et la tirai vers moi, dans le placard. Elle poussa un petit hurlement, que je noyais dans ma main lorsque je la plaçai sur sa bouche. Elle se tendit un instant avant de voir que c’était moi.

- Qu’est-ce que tu fous ? me demande-t-elle.

- A ton avis, qu’est-ce que je fous ? Je veux parler avec toi et c’est la seule idée qui m’ait venu.

- T’as des idées bizarres, répond-elle.

- Je sais, mais je m’en fiche si au final, j’arrive à te parler.

- Et pourquoi tu veux me parler ? Je te signale que c’est toujours toi qui parles dans nos conversations, enfin presque.

- Oui, bah je mise sur le presque en ce moment.

- Tu n’as pas répondu à la question, lâche Julie.

- Mais parce que j’aime bien te parler, tu es mon ami et…

- Oui, ton ami, fait-elle en baissant la tête.

- Attend ! C’est pour ça que tu ne me parle plus, parce que je suis juste ton ami ? Mais je croyais après ce que tu m’as dit que…

- Quoi ? Absolument pas ! J’ai peut-être été un peu embobiner par tes gestes, c’est tout.

- Alors là, tu m’as perdu, je lui dis.

- C’est bien le problème.

- Bref, revenons au sujet, je lâche. Tu n’avais pas le droit de m’éviter.

- Je ne t’évitais pas !

- Ah bon ? Alors tu appelles ça comment le fait de partir à l’opposé à chaque fois que je suis là ?

- Okay, okay, je t’évitais !

- J’ai le droit de savoir pourquoi. Tu sais très bien que tu peux me parler et même si ça t’a fait peur de me dire tout ce que tu m’as dit la dernière fois, moi je m’en fiche. Ça ne me fait pas peur.

- Mais moi j’ai peur, Noah. Tu comprends ! Je suis terrorisée à l’idée de…

- De quoi ? Tu peux compter sur moi, toujours.

Et là, elle fit la seule chose qui me laissa perplexe et immobile. Elle m’embrassa. D’abord, trop surpris, je ne réagis pas. Puis, je retrouvai mes moyens et lui rendis son baiser. Puis, comme si elle avait repris ces esprits, elle s’arrêta et s’enfuit, me laissant désorienté et inquiet.


 

Chapitre Huit.


Ayant pris ma décision, je me dirigeai vers la maison de Julie, qui habitaient dans un quartier tranquille. Un tantinet stressé par ce que je m’apprêtais à faire, je restai devant sa porte avant de toquer, deux minutes plus tard. J’attendis, essuyant mes mains moites sur mon pantalon. Puis, la porte s’ouvrit sur Julie, surprise de me voir.

- Il faut qu’on parle, je lui dis avant qu’elle n’ait le temps de dire quoi que ce soit.

- C’est pas bon signe, ça, dit-elle d’une petite voix.

- Non, mais il le faut.

- Que veut-tu donc ? fait-elle dans un ton dure, comme si elle avait compris que j’allais la blesser et qu’elle mettait en place son mur de protection.

- J’ai compris comment tu fonctionnais, et je sais que tu veux pas être blessé, mais t’es-tu seulement demandé si je n’allais pas souffrir de tout ça. De tes va et viens incohérents. Je ne sais pas ce que tu veux et j’en ai marre de me poser cent questions auxquelles je n’ai pas les réponses et auxquelles tu ne répondras pas.

- Tu sais très bien que…

- Oui, mais je peux plus continuer comme ça. J’ai besoin que tu aies confiance en moi, je l’interromps.

- Mais j’ai confiance en toi ! réplique t-elle.

- Non, sinon tu me dirais tout, sachant que je garderais tes secrets. Je sais que tu as peur mais aie un peu foi en moi.

- Tu… tu ne comprends pas, dit-elle, des larmes perlant au coin de ses yeux.

- Oui, c’est normal, tu ne m’explique rien, je dis un peu trop fermement. Et c’est pour ça que j’ai pris la décision de ne plus te voir tant que tu n’auras pas compris que quand on est ami, ça marche dans les deux sens.

- Tu…

- Au revoir, Julie, je dis en partant, sans me retourner car ce serait trop douloureux.


 

Chapitre Neuf.


Cela faisait une semaine depuis que j’étais allé voir Julie chez elle. Elle me manquait mais je ne pouvais rien dire, c’était ma décision. C’était pour le mieux. Parfois, en cours, je lui jetais des coups d’œil sans qu’elle le voie. Mais ça s’arrêtait là.

A la sortie des cours, j’allais à mon entrainement de foot sur le terrain du lycée. Une fois arrivée, je stoppai net en voyant qui m’attendait. Elle sourit quand elle me vit.

- Salut, je dis une fois près d’elle.

- Salut, fait Julie d’une petite voix. Comment vas-tu ?

- Bien et toi ?

- J’ai réfléchi, lance-t-elle sans répondre à la question. Et je suis prête à répondre à tes questions.

- Toutes mes questions ?

- Oui.

- Que t’est-il arrivé pour que tu sois si renfermée sur toi-même ?

- Je t’ai menti quand j’ai dit que je n’étais sortie avec personne. Il y a un an et demi, je sortais avec un garçon d’un autre lycée. On s’était rencontré pendant les vacances et je suis tombée folle amoureuse de lui. Mais, comme chaque chose que je touche, je l’ai brisé.

- Comment ça ?

- Il est tombé malade, très malade et… et

Elle n’eut pas besoin de continuer sa phrase. Je compris ce qui s’était passé. Je compris tout.

- Il avait une leucémie. Je ne m’en suis pas remise. Tu aurais dû me voir après ça, j’étais un zombie. Seul ma mère a réussi à me faire manger et reprendre un semblant de vie, mais je n’ai approché personne après. J’ai délaissé mes amis par peur de les perdre. Puis, tu es arrivé et tu étais tellement insistent et têtu, que je n’ai pas pu te repousser.

- Oui, plus têtu que moi, tu meurs, je réponds et elle rigole en entendant ma phrase.

- Tu m’as redonné envie de m’approcher des gens. De me faire des amis.

- J’espère que j’ai bien fait !

- Oui. Mais quand tu es venu chez moi, tu m’as fait vraiment peur. J’ai cru que je t’avais perdu.

- Désolé, je ne le ferais plus.

- Promis ?

- Promis, je dis sincèrement.

C’était la chose la plus sincère que j’avais dit de toute ma vie. Et pour bien lui faire comprendre, je m’approchai d’elle et posai mes lèvres sur les siennes pour un baiser empli de belles promesses.


 

Chapitre Dix.


Dix ans plus tard.


Je me réveillai et vis ma femme, allongée près de moi, toujours aussi belle. Son ventre rond ne la rendait que plus magnifique à mes yeux. Elle ouvra ses yeux et me regarda à son tour.

- Bonjour, me dit Julie.

- Salut.

- Tu me dévisage.

- Oui, je réponds même si ce n’est pas une question. J’aime bien te regarder. J’aimerais toujours te regarder.

Elle répondit en m’embrassant, me témoignant son amour.

- Je t’aime, je lui dis.

- Je t’aime, me répond-elle.

Je lui rendis son baiser, puis allais me préparer un petit déjeuner. Depuis que Julie était devenue ma femme, mon monde était meilleur. Et je savais aussi que je la rendais heureuse parce que je lui avais fait une promesse pour l’éternité, celle d’être son mari. Et ce rôle me convenait parfaitement. Surtout depuis que je savais que j’allais être père. Rien ne me rendit plus heureux que de savoir que notre famille va s’agrandir avec un petit bout de chou qui reflétait notre amour. Un amour invincible.


FIN.


Crédit Photos : Pinterest

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